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L'abri orné de Le Val La vallée des Merveilles
Afin de pouvoir comparer l'art des peintures rupestres provençales, et en particulier les peintures de la roche de Gueillet avec d'autres représentations rupestres, nous allons ici faire une présentation sommaire du site de la Vallée des Merveilles.
La Vallée des Merveilles se trouve dans les Alpes-Maritimes, à proximité de la vallée de la Roya et du col de Tende. Elle a une altitude de 2300 m et hérite d'un climat dur où la violence légendaire des orages qui se déchaînent sur le mont Bego est sans doute liée à la nature de son sous-sol riche en minerai de fer. De tout temps cette vallée semble avoir impressionné les populations locales, et cette peur, ou ce respect réapparaissent dans la toponymie des lieux: Vallée des Merveilles, mont Bego (celui qui domine), la Valmasque (Masca=sorcière), cime du diable,... Elle a néanmoins attiré curieux et érudits, et dès 1650, l'historien niçois Gioffredo mentionnait pour la première fois la Vallée des Merveilles. Il faudra attendre les années dix-huit cent quatre-vingts pour qu'une étude systématique soit entreprise par le botaniste Clarence Bicknell qui relèvera plus de onze mille gravures. Actuellement, et depuis 1967, les recherches sont poursuivies chaque été par une équipe de chercheurs dépendant du laboratoire de paléontologie humaine et de préhistoire de Marseille.
On dénombre actuellement plus de cent mille gravures réparties
dans la Vallée des Merveilles et les Ciappa de Fontanalba. Ces gravures ont
été exécutées par piquetage de la roche et apparaissent en gris vert assez
clair sur la patine rose de la roche. Dans l'état actuel des recherches,
l'emplacement des roches gravées semble n'être dû qu'au hasard. en ce qui
concerne les gravures elles-mêmes, on peut les classer en quatre groupes de
thèmes iconographiques:
Le groupe est essentiellement représenté par les corniformes ou figures cornues qui représentent la grande majorité des figures gravées. Leurs dimensions varient à l'infini, et certaines sont même utilisées comme charpente pour des motifs plus complexes: le sorcier, le christ, certains réticulés, ... Il est à peu près certain que ces figures représentent le taureau et le bœuf en projection verticale; dans ce sens plusieurs attelages représentant ces formes avec une araire sont disséminés sur le site. La valeur sacrée de ce signe, en accord avec le mythe du taureau dans le bassin méditerranéen, est mise en évidence par le grand nombre de fois où il est employé, et par son association avec des anthropomorphes très particuliers et uniques tels le chef de tribu et le sorcier.
Ce groupe comprenant à la fois des gravures représentant des armes (poignards, épées, hallebardes, ...) et des outils (faux, faucilles, ...) est un outil extrêmement précieux, et le seul qui soit à notre disposition pour dater les gravures. En effet, en comparant les gravures aux armes caractéristiques d'une époque donnée, on peut remonter au modèle de la gravure et ainsi dater celle-ci.
On peut distinguer dans ce groupe deux sous-groupes constitués des "petits personnages" et des "grandes figures". Les petits personnages sont les plus nombreux et apparaissent soit isolés dans la position de l'orant, soit en relation avec d'autres gravures comme dans le cas d'attelages. Plus rares et souvent uniques, les grandes figures paraissent plus complexes et plus significatives, bien que leur sens nous soit encore caché. Leur facture est remarquable et leurs emplacements semblent avoir été choisis avec soin. On retrouve souvent, comme motifs de charpente ou comme motifs associés des figures cornues qui "sacralisent" en quelque sorte le sujet représenté.
On a rangé dans cette catégorie diverses figures d'aspects très différents et parmi lesquelles se distinguent les figures appelées "réticulés". On notera qu'il existe, plus bas dans la vallée, d'énormes structures de murettes qui rappellent le dessin de certains réticulés; on peut supposer aussi que certaines figures pouvaient servir à l'élaboration d'un cadastre en représentant champs, maisons ...Enfin, on trouve des signes dont la signification nous est totalement inconnue dans le contexte: cercles, cercles concentriques, points, rectangles, ....
La datation des gravures, comme on l'a déjà signalé, est basée sur l'étude des armes et des outils représentés. Il semble à peu près certain maintenant que les premières gravures aient été exécutées au début du premier Age du Bronze, et que la cessation de l'activité rupestre coïncide avec l'Age du Bronze final. Pour mémoire: Plus récemment la chronologie des gravures du M. Bego a
été revue et est maintenant beaucoup plus longue, en datant les figure plus
anciennes (topographiques, reticules) au Néolithique Final (2eme moitié di
4eme millénaire a. C.), les armes (poignards et hallebardes) au Chalcolithique
(2 mill. a. C.) et au Bronze Ancien (2200- Elles furent découvertes tardivement (en 1973) dans la partie haute du val d'enfer dans un gias. On distingue sur une roche à la surface tourmentée trois motifs, dont deux semblent représenter une scène de chasse tandis que le dernier, un peu à l'écart, évoque un guerrier. Le type naturaliste des peintures et l'usage de la couleur suggèrent une ancienneté relative et les font classer dans la première période des gravures rupestres (Enéolithique ou premier Age du Bronze). Des gravures beaucoup plus tardives ont été découvertes dans la Vallée des Merveilles; ces gravures, dites "linéaires" sont discutées dans une autre page de ce site, pour illustrer le site des gravures linéaires de Gueillet.
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"un essai d'interprétation":
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